(Download) "Paris inconnu" by Privat D'Anglemont & Francis Coindre # Book PDF Kindle ePub Free
eBook details
- Title: Paris inconnu
- Author : Privat D'Anglemont & Francis Coindre
- Release Date : January 28, 2013
- Genre: Europe,Books,History,Science & Nature,
- Pages : * pages
- Size : 2001 KB
Description
Où était-il né ? De qui était-il né ?
Il était né à Sainte-Rose, dans le coin le plus poétique de la plus poétique des Antilles, — il y a quelque quarante ans de cela.
Son père… Mais pourquoi ne pas imiter à ce sujet la discrétion dont il faisait si délicieusement preuve lui-même ? Lui qui avait le droit de soulever le voile qui cachait son état civil, il ne l’a jamais fait : pourquoi le ferions-nous ? Privat avait eu un père, comme tout le monde, parce que, d’après Brid’oison, on est toujours le fils de quelqu’un. Il avait eu un père et une mère, et s’il vénérait l’une, il respectait aussi l’autre. D’où qu’il venait, il se sentait bien né, — cela lui suffisait. Après tout, ce ne sont pas les parchemins qui font les gentilshommes. Heureux ceux qui commencent à eux et qui sont souche au lieu d’être rejeton !
Privat n’avait pas de nom : il s’en fit un, et, pour le porter plus à son aise, il vint à Paris, où il fit ses humanités, ayant pour compagnons d’études deux des fils du roi Louis-Philippe.
Il était jeune alors, très jeune, et il ne savait guère encore quelle branche de l’Y de Pythagore il devait prendre. L’Inconnu a des séductions pour les imaginations vingtenaires ; on aime à se laisser aller à la dérive, sans rame et sans boussole, au fil de l’eau et du hasard : Privat, créole insoucieux, esprit aventureux, alla où le vent parisien le poussait.
C’est ainsi qu’il devint homme de lettres.
On ne s’attend pas, sans doute, à me voir suivre Privat pas à pas dans sa carrière littéraire : il allait trop vite, d’ailleurs, avec ses grandes jambes, pour que cela me soit possible. Il avait l’esprit : il le dépensait sur son chemin, avec son argent, les jetant l’un et l’autre par toutes les fenêtres, — et en inventant même, lorsqu’il n’y en avait pas assez à son gré.
Cette indifférence à l’endroit de ses œuvres s’explique par l’indifférence de Privat à l’endroit même de sa vie. Il vivait gaiement et insouciamment, tantôt riche, tantôt pauvre, écrivant là où il pouvait, causant plus encore qu’il n’écrivait, en courageant les autres et ne se décourageant jamais lui-même. Quant à s’intéresser outre mesure à ce qui constitue le bien-être, le bonheur, il n’y songeait pas, — heureux qu’il était à sa façon, comme les oiseaux le sont sur leurs branches. Les oiseaux chantent : Privat chantait, c’est-à-dire causait et écrivait. Je ne l’ai jamais surpris en train de se plaindre, — jamais non plus en train de médire du prochain et de la prochaine. Pourquoi les gens d’esprit ne seraient-ils pas des gens de cœur ?
Comme Mercier, Privat a écrit des livres avec ses jambes.
Car, héritier de Pierre Gringoire et de François Villon, il déambulait à travers Paris et battait de sa semelle infatigable ce vieux pavé de nos vieilles rues, qu’il connaissait si bien. Lui aussi, vagabond involontaire ou volontaire, bohème « sans croix ne pile », il explorait vaillamment les dessous de Paris. Lui aussi, — tout en rimant des ballades à la lune et des sonnets « aux gentes saulcissières », — trouvait moyen d’apporter sa part de découvertes aux Alexis Monteil du présent et de l’avenir, en écrivant au jour le jour ses Petits Métiers et ses Industries inconnues, qui resteront comme de précieux documents à consulter pour les futurs bénédictins qui auront à écrire l’histoire de Paris du XIXè siècle.